Lily, notre troisième enfant est là, parmi nous, depuis déjà trois mois. Trois mois! Nous n’avons rien vu passer! Depuis un moment, je tourne et je vire devant mon écran, à me demander si je me lance. Si je vous raconte mon troisième accouchement, comme tant d’autres l’ont déjà fait avant moi. On pourrait dire: « C’est bien un truc de meuf, ça, de parler placenta et ragnagna! »
Oui, mais en même temps, c’est tellement dingue de donner la vie!
Je vous avais raconté ma troisième grossesse dans un billet précédent. Article qui me plait à relire, parce que tout n’est qu’émotions, que tout est de l’ordre du passé, déjà.
Comment s’est déroulé mon troisième accouchement?
C’est mon troisième. On pourrait croire que je suis rodée. Non! Je vous rassure, j’avais à peu près autant d’appréhensions que pour les deux premiers!
Pour moi, un accouchement, c’est un peu comme une épreuve sportive! On se prépare en amont pour une épreuve physique et psychologique le jour J!
Et, on ne sait jamais comment la rencontre va se dérouler!
3 accouchements, 3 expériences différentes
Pour mon fils, j’ai perdu les eaux au milieu du salon! C’était clair et net! J’ai accouché en 4h! Un cas d’école! Contractions à intervalles réguliers, qui s’intensifient. Poussées, et « paf! » il arrive! Il s’agit d’une version condensée bien sûr!
Pour ma première fille, j’ai accouché en 2h! C’était d’une intensité rare. Tout est allé si vite! La sage femme m’a même permis de « m’accoucher moi même »! J’en perdais mon latin et ne pouvais que répéter « Oh mon Dieu! Oh mon Dieu! » Je suis ensuite repartie sur mes deux jambes dans ma chambre de parturiente!
Troisième accouchement: Je n’ai jamais eu de péridurale.
De nature à vouloir tout maitriser, j’ai peur du monde médical. Peur de l’aiguille anesthésiante, méfiance quant à l’absence de sensations plus que des douleurs dans mon corps.
Mes préparations à l’accouchement chez les sage femmes, et notamment la sophrologie, m’ont permis « d’apprendre à appréhender » les contractions, de me laisser porter par leur rythme cyclique pour faire avancer le travail.
En outre, les contractions sont des aides à la venue de bébé. On a mal, mais on sait pour quoi. On va donner la vie.
Là est la grande différence avec une personne qui a des douleurs quotidiennes, dont elle ne connait ni l’origine ni la fin.
Des maux que j’ai pu ressentir pendant plus de 10 ans pour d’autres raisons.
Mon troisième enfant arrive.
Pour Lily, j’ai fissuré la poche des eaux au petit matin du 11 février. J’étais un peu perdue car je n’étais pas sûre de moi. Peut être m’étais je fait pipi dessus?
Les grands étaient chez leurs grands parents depuis quelques jours pour les vacances scolaires.
A l’aube d’une nouvelle journée, celle de tous les possibles, j’avançais vers mon épreuve, accompagnée de mon Ours.
J’avais la sensation de flotter hors du Temps. C’était pour aujourd’hui. Ca allait être à moi de jouer.
Pourtant, je ne ressentais rien.
Absolument rien.
Aucun travail.
A la maternité pour mon troisième accouchement
9h. Fraiche comme un gardon, je suis arrivée à la Polyclinique!
On m’a fait un monito, et un prélèvement pour savoir si j’avais bien fissuré la poche des eaux.
« Oui, m’dame, vous restez avec nous! Par contre, si le travail ne démarre pas, nous serons obligés de le déclencher!«
Ca, c’était pas prévu dans mon scénario! Car qui dit déclenchement, dit ocytocine artificielle, dit monito, dit péridurale, dit bloquée!
Le sourire m’a quittée, la peur est montée, viscérale.
Maitriser. Tout m’échappait.
Alors, j’ai pris le taureau par les cornes.
J’ai marché pour que le travail démarre seul. Pour que le bébé descende et se tourne. Pour que le col s’ouvre, sans avoir besoin de chimie.
12h30-19h30.
Les copines ont appelé ou m’ont envoyé des messages de soutien. Elles ont senti mon angoisse et celles qui ont pu, sont passées à tour de rôle me faire un coucou, me soutenir, me tenir compagnie.
Elles ont « randonné » avec moi, sur la pelouse de la Polyclinique, dehors, devant, derrière le parking!
Ces imbéciles ont dit des bêtises pour passer le temps, pour occuper mon Ours, ce mari si attentionné.
Mon père aussi est passé me voir, me faire un bisou!
C’était le monde à l’envers! J’avais des visites alors que mon ventre était tout aussi gros, tout aussi plein!
Mais, j’étais (je suis) emplie de gratitude envers eux: ils avaient coupé avec leur quotidien à 10000 à l’heure, pour me soutenir..
En fin de journée, j’ai commencé à avoir des contractions. Ouf! Le travail se mettait en route! Installée sur mon gros ballon, je faisais aller et venir mon bassin.
19h30.
La sage femme est venue m’ausculter. Allez, vu comme les contractions m’électrisaient, mon col devait bien être ouvert à 4!
« Oh, c’est bien madame Lab, votre col est à 2.5 fermé!«
9h-19h30 pour un 2.5 fermé? C’est une blague?
Mais on peut passer en salle nature si vous le désirez!
20h.
Ca c’était la bonne nouvelle. La perspective d’un déclenchement s’éloignait donc!
La salle nature, c’est une grande pièce où l’on peut écouter de la musique de relaxation, où l’on peut prendre un bain, où l’on peut se mettre dans « toutes » les positions pour un accouchement plus physiologique.
La sage femme de cette pièce m’a refait un monito pour voir où j’en étais, pendant 1h. C’était long! Mes contractions s’intensifiaient! Et, j’étais obsédée par le fait que je ne pouvais plus bouger comme je voulais.
21h.
On m’a auscultée de nouveau. Bon, là, je dois bien être à 4 voire 5 car je les sens bien ces contractions. Et puis, ça fait un moment que j’y suis, ça a dû bien évolué!
« Super Julie, vous êtes à 2.5 souple! Lorsque le bébé aura tourné ça ira tout seul, c’est votre 3e! «
Soupirs. A ce moment là, je me suis sentie un peu désemparée.
Je commençais à me sentir lasse et fatiguée. J’étais éveillée depuis 3-4h du matin, j’avais marché toute la journée avec mon gros bidou sans m’arrêter.
Mon corps a alors été pris de tremblements nerveux..
Comment était ce possible qu’avec tout ce que je faisais, ce corps d’habitude si réactif, ne s’ouvrait pas plus vite que ça?
22h.
La sage femme est revenue me voir, ravie. Avec la gynéco de service, elles s’étaient concertées et avaient décidé de me proposer de prendre un bain pour me détendre!
Ca, c’était une excellente nouvelle pour moi! Etant donné que j’étais là depuis 9h du matin, et que l’on m’avait injecté par deux fois des antibios, j’avais le droit, même si j’avais fissuré!
Le bain a eu immédiatement un effet bénéfique sur moi! En quelques secondes, je me suis détendue.
L’eau et moi, on est amies depuis toujours!
De façon incroyable, j’arrivais à me plonger dans un état de somnolence/léthargie entre deux contractions. Je pouvais m’endormir dans l’eau chaude pour 30/40 secondes avant qu’une contraction ne monte en moi et ne prenne possession de tout mon corps.
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Délivrance et joie de tenir son enfant dans ses bras
A partir de ce moment, tout est allé très vite. En une heure, les contractions se sont encore intensifiées jusqu’à ce que je me mette à hurler « je poussseeee!«
En un instant, je me suis retrouvée avec toute l’équipe médicale autour de moi!
Je n’avais jamais eu autant de monde pour pareil événement! 1 gynéco, 2 sage femmes, 1 infirmière!
Exit toutes les positions de poussées apprises en prépa à l’accouchement! Ces envies d’expulser qui remontent à la Nuit de Temps ne me permettaient pas de me positionner comme je le souhaitais.
Avec mon Ours, nous nous sommes retrouvés tête contre tête, dans un corps à corps, pour un même but: la délivrance. En position de cloporte arc bouté (dénomination absolument pas médicale mais très parlante!^^) j’ai poussé de toutes mes forces.
Encore et encore.
Avec lui, je me sentais plus forte. Malgré toute la fatigue accumulée de la journée.
Pousser. Pousser.
Jusqu’à ce que sage femmes et gynéco déposent sur moi un petit être si fragile, si léger, si petit, si dépendant sur mon sein.
Peau contre peau.
Mon cerveau a débranché.
Je suis atone.
Bienvenue Lily!
Julie Lab.